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Article "Rebonds"

Monsieur le Président. Par Bouvard et Pécuchet, collectif de doctorants en droit public

LIBÉRATION : mardi 12 février 2008

mercredi 13 février 2008

Monsieur le Président,

Nous ne sommes pas la France, nous ne sommes pas des victimes, nous ne sommes pas des puissants, nous ne sommes que des citoyens. Depuis neuf mois que le suffrage universel vous a porté à l’Elysée, vous avez souhaité marquer la direction de l’exécutif d’une empreinte nouvelle. Hélas, la nouveauté n’est pas une fin en soi, la rupture n’est pas à elle seule un programme et le progrès ne se décrète pas. Dire que nous sommes fiers d’être français n’a pas de sens dans la mesure où nous n’avons eu qu’à naître pour obtenir cette nationalité que beaucoup envient. Toutefois, nous aimons profondément notre pays, pour ce que nous avons appris à connaître de lui, de son histoire, de son présent et plus généralement de sa culture, que nous savons riche. Et cela, nous l’avons appris sans vous. Mais s’il n’est pas de fierté que nous puissions revendiquer de manière sensée, c’est bien de honte que nous sommes frappés lorsque, au fil des semaines, vous confondez votre réussite personnelle et l’intérêt général.

Lorsque, par complaisance, vous épousez les thèses de vos homologues internationaux, souvent en contrepartie de contrats qui n’ont de valeur certaine que celle du papier qui en porte les clauses ; lorsque, avec arrogance, vous multipliez les signes d’une amitié feinte avec des chefs d’Etat qui n’en souhaitent pas tant ou au contraire, donnez à certains peuples l’impression du mépris ; lorsque vous tentez une diplomatie faite de coups d’éclat, c’est l’image d’une France impuissante que vous renvoyez. Lorsque vous utilisez votre image personnelle et celle de vos proches collaborateurs, puis confondez votre vie privée et celle de chef d’Etat, comme autant de leviers pour qu’un événement médiatique en chasse un autre, c’est la question essentielle de la politique que vous éludez. Enfin, nul n’est besoin pour vous de chercher à simuler une proximité avec les Français ou une simplicité faite d’humour déplacé et d’un langage appauvri. Nous accepterions volontiers que notre avenir ne dépende pas de politiques décidées dans l’instant, mais d’actions réfléchies. Or, s’il n’est pas en votre pouvoir de reconstruire une opposition parlementaire digne de ce nom, c’est à vous qu’incombe de laisser agir la représentation nationale et les organes constitués chargés d’assurer les fonctions de l’État, et non des organismes privés ou les maires du palais que sont vos proches conseillers. Peut-être verrez-vous dans ces lignes l’expression d’une « pensée unique », mal suprême semble-t-il qui, invoqué par vous, permet de balayer d’un revers de main, et sans appel, tout propos qui ne correspondrait pas à vos attentes. Certes, vous ne manquerez pas d’opposer à nos simples propos l’action censée vous caractériser et à nos mots soignés ceux de votre vérité. Seulement, nous ne pouvons nous résigner à taire une irritation qui confine à la colère et nous pousse à assumer cette prétention consistant à vous écrire. Nous craignons que le rabaissement de la fonction présidentielle, clé de voûte de nos institutions, n’entraîne l’affaissement de l’édifice républicain.

Voir en ligne : LIBÉRATION

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